Réchauffement climatique : le cacao dans la ligne de mire (Partie 1)
RESSOURCES établit, dans ce dossier, un état des lieux en quatre parties où États, industriels, agronomes et producteurs ont tous un rôle à jouer pour préserver la culture du cacao face aux différents dangers qui la menacent.
Cela fait déjà plusieurs années qu’on en parle : dans les prochaines décennies (horizon 2030-2050), le cacao pourrait connaître une crise majeure, sous le double effet du tarissement de l’offre et d’une demande qui ne cesse de croître (2 à 5 % par an), portée par les pays émergents. En cause ? L’essoufflement programmé de la production, dû au réchauffement climatique et aux nombreux effets pervers engendrés par la structure extrêmement déséquilibrée du marché de la fève brune.
Bien que l’on en soit pour l’instant au stade de la recherche et du développement, il est encore temps de sauver le soldat cacao, notamment par le biais de méthodes culturales alternatives. À condition toutefois que la prise de conscience des monumentaux enjeux à l’œuvre s’accompagne d’une volonté politique forte de la part des autorités et d’une implication active de l’ensemble des acteurs de la filière, mais aussi d’autres chaînes de valeurs et des secteurs non agricoles.
La tendance à l’assèchement du climat dans le sud de la Côte d’Ivoire et du Ghana – qui totalisent près des deux tiers de la production mondiale – et son impact défavorable sur la production cacaoyère des deux pays sont perceptibles depuis 1950. Mais c’est seulement au début des années 2010 que l’opinion publique et les opérateurs du secteur ont commencé à réellement prendre au sérieux la menace climatique et ses conséquences sur la production d’or brun. En 2016, un article de Michon Scott publié sur le site de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) rappelait les exigences bioécologiques très spécifiques du cacao et exposait les enjeux auxquels le réchauffement climatique soumettait la culture de ce dernier, se référant notamment au rapport « Changements climatiques 2014 » du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat).
Chaud cacao
Plante des tropiques humides, le cacao ne peut se développer que dans les latitudes voisines de l’équateur (de 20 °N à 20 °S). Cet arbre délicat a besoin de l’équilibre que lui procure un écosystème riche et complexe incluant des températures relativement uniformes (maximales moyennes comprises entre 30 °C et 32 °C et minimales moyennes de 18 °C à 21 °C, avec un minimum absolu de 10 °C), un taux d’humidité élevé (optimum : 85 %) et des pluies abondantes (pluviométrie annuelle de 1 500 à 2 500 mm, avec moins de trois mois de pluviométrie inférieure à 100 mm), des sols profonds, riches en azote et bien drainants pour que les racines ne soient pas asphyxiées, et une protection du vent, susceptible d’entraîner d’importantes défoliations. Dans leur habitat naturel, les plants de cacao apprécient également l’ombre apportée par les essences de haute taille qui les entourent.